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Hubert Reeves, né le à Montréal (Québec), est un astrophysicien, vulgarisateur scientifique et écologiste canadien naturalisé français.

Ayant commencé sa carrière en tant que chercheur en astrophysique, il pratique aussi la vulgarisation scientifique depuis les années 1970 et s'avère aussi un militant écologiste depuis les années 2000.

Biographie

Jeunesse et formation

Hubert Reeves est le petit-fils de l'architecte Charles-Aimé Reeves1. Alors qu'il est enfant à Léry, une petite ville au bord du lac Saint-Louis au Québec, son père apporte à la maison l'Encyclopédie de la jeunesse. Cette lecture ouvre en lui le désir d'explorer le monde et le cosmos2.

 
Hubert Reeves est astrophysicien.

Inscrit à la Faculté des sciences de l'Université de Montréal, il obtient une licence de physique (1953), puis présente, à l'Université McGill, un mémoire de maîtrise intitulé Formation of Positronium in Hydrogen and Helium (1955).

Il poursuit ses études en astrophysique nucléaire à Cornell (Ithaca, N.Y.), où il côtoie plusieurs physiciens contemporains tels George Gamow, Richard Feynman, Fred Hoyle, Philip Morrison et Ed Salpeter, son directeur de thèse3. En 1960, il soutient sa thèse de doctorat, intitulée Thermonuclear Reaction Involving Medium Light Nuclei.

Début de sa carrière de professeur universitaire

De 1960 à 1964, il enseigne la physique à l'Université de Montréal, tout en étant conseiller scientifique à la NASA, à New York.

Cette période coïncide avec la Révolution tranquille québécoise qui entraîne, entre autres, un certain mouvement francophile chez plusieurs professeurs de l'Université de Montréal. Reeves, qui refuse de n'utiliser que des manuels scolaires francophones, perçoit une dégradation du climat de travail lorsque certains de ses collègues professeurs lui font des remarques aigres, ce qui lui donne envie d'« aller voir ailleurs ». Le refus de collaboration entre des professeurs de l'Université de Montréal francophone et l'Université McGill anglophone sur un projet d'accélérateur de particules a été, selon Reeves, déterminant quant à son choix de quitter le Québec4. Durant un stage d'été au Centre nucléaire de Chalk River, en Ontario, il lui est proposé de donner une série de cours à des chercheurs belges de physique nucléaire. Quelques mois plus tard, Caltech lui offre un poste au sein du laboratoire de William Fowler.

Hubert Reeves, voulant réaliser un vieux rêve de s'établir en Europe et s'étant déjà engagé envers les Belges, demande à Caltech de reporter son offre d'un an, ce qui lui est refusé. Selon Reeves, cet événement a refroidi ses relations avec cette université jusqu'à la fin des années 19605.

Départ de Montréal pour l'Europe

L'Université de Montréal accorde à Hubert Reeves une année sabbatique et ce dernier déménage, en 1964, à Bruxelles. Il commence à enseigner à l'Université libre où il constate, entre autres, une forte différence entre l'Amérique du Nord et l'Europe dans les relations professeur-étudiants6. La même année, recevant une invitation de l'Académie des sciences soviétique, il fait un séjour en URSS où il rencontre, notamment, Iakov Zeldovitch7. Reeves est profondément marqué par la culture communiste instaurée dans ce pays8.

 
Reeves a été Directeur de recherche au CNRS.

Un physicien travaillant au CSNSM à Orsay participe à une séance d'enseignement de Reeves et lui offre de venir travailler avec lui. Reeves demande une seconde année sabbatique à l'Université de Montréal, qui la lui accorde. Le CNRS français lui offre un poste de directeur de recherche9 et la famille Reeves déménage en France en 196510. La même année Reeves deviendra aussi consultant scientifique au Commissariat à l’énergie atomique à Saclay, en France9.

Durant cette période, les groupes de recherche en astrophysique nucléaire du CSNSM, à Orsay et du laboratoire de Fowler, à Caltech, s'ignorent mutuellement dans leurs publications respectives. D'après Reeves, les relations entre ces groupes de recherche se sont améliorées lors d'une intervention de Fowler à une conférence à Jérusalem en 1969. Le froid aurait pris définitivement fin lors d'une publication commune aux deux laboratoires en 197011.

En 1971, Reeves publie avec deux de ses étudiants, Jean Audouze et Maurice Meneguzzi, un article intitulé The production of the elements Li, Be, B by galactic cosmic rays in space and its relation with stellar observations12, qui s'avère fondamental concernant la nucléosynthèse stellaire. Quatorze ans après le célèbre article B2FH, cet article permettait de combler le vide existant entre les éléments fabriqués lors du Big Bang (l'hydrogène, l'hélium et quelques traces de lithium) et ceux produits lors de la vie des étoiles, soit tous ceux situés après le carbone dans le tableau périodique des éléments de Dmitri Mendeleïev. Tout comme B2FH, cet article clef est plus connu sous les initiales de ses auteurs : MAR13.

Vulgarisation scientifique

Dans les années 1970, Reeves commence à s'exprimer publiquement sur divers sujets liés, entre autres, à la physique nucléaire. C'est lors de vacances à Carry-le-Rouet, où il partage, nuit après nuit, ses connaissances en astronomie avec d'autres vacanciers, qu'il commence réellement une carrière de vulgarisateur scientifique14. À la suite de la suggestion d'une amie, il décide de mettre par écrit ses connaissances et commence la rédaction de Patience dans l'azur, dont le titre est inspiré d'un poème de Paul Valéry. Le manuscrit, refusé par une trentaine de maisons d'édition, est réécrit par Reeves avec l'aide de son ami physicien Jean-Marc Lévy-Leblond, pour être finalement publié en 1981. Le livre connaît un grand succès après sa présentation à l'émission Apostrophes de Bernard Pivot15.

Pendant cette période, au début des années 1980, Reeves est de plus en plus populaire et donne de nombreuses conférences publiques et participe à des émissions de télévision et à des films, parlant non seulement de l’astronomie, mais aussi de l’environnement9,16.

 
Les éléments lourds de l'Univers se forment à l'intérieur des étoiles massives et sont rejetés dans l'espace à la mort de ces dernières.

Plusieurs lecteurs d'Hubert Reeves lui écrivent des lettres qui influencent la pensée et les choix d'écriture du scientifique17. Ainsi, une lectrice de Patience dans l'azur lui envoie une lettre qui l'inspire à écrire Poussières d'étoiles, sorti en 1984 et dans lequel il met en exergue un passage de la lettre qui l'a inspiré : « On m'a dit : Tu n'es que cendres et poussières. On a oublié de me dire qu'il s'agissait de poussières d'étoiles. »18. Dans ce livre, il rappelle, entre autres, que les atomes qui composent la Terre et ses habitants ont été constitués à l'intérieur des étoiles massives et ont été disséminés dans l'espace lors de la mort de ces dernières.

Certains lecteurs critiquant ce qu'ils considèrent comme un optimisme excessif chez Reeves, ce dernier décide, en 1984, d'écrire sur la plus grande menace planétaire perceptible à l'époque, celle engendrée par la guerre froide. Il publie ainsi L'Heure de s'enivrer en 1986, où il dresse, entre autres, un portrait inquiétant des arsenaux nucléaires des deux grandes puissances américaine et soviétique19.

 
Pyramide de la complexité telle que développée par Reeves.

Il anime une série d'émissions-conférences télévisées intitulée Histoire de l'Univers20, qui sera diffusée à plusieurs reprises au cours des années 1990 et 2000 au Canal Savoir. Il y reprend, entre autres, l'idée de la pyramide de la complexité, un concept, développé dans L'Heure de s'enivrer, décrivant la complexification de l'Univers, du Big Bang jusqu'à aujourd'hui.

En 2000, il fait don de 100 000 dollars canadiens à l'université Laval pour créer le fonds Hubert-Reeves qui permet d'offrir chaque année des bourses à des étudiants de deuxième cycle en astrophysique21.

Ses principaux ouvrages, Patience dans l'azur, Poussières d'étoiles et L'Heure de s'enivrer, connaissent un énorme succès et sont traduits dans plusieurs langues.

Par ailleurs, Hubert Reeves participe à des émissions télévisées de vulgarisation scientifique, dont la plus emblématique a été sans doute la Nuit des étoiles, diffusée sur la chaîne publique française France 2.

Pour les 70 ans du magazine Sciences et Avenir , Hubert Reeves participe à la rédaction du numéro de novembre (no 849) en tant que rédacteur en chef exceptionnel, avec 4 autres scientifiques. Il y écrit notamment sur l'univers et les grandes découvertes qui s'y rapportent22.

 
Hubert Reeves à La Sorbonne (Paris, France) photographié en 2001 par Olivier Meyer.

Militantisme

 
Hubert Reeves en 2008.

À l'aube des années 2000, sensibilisé à l'impact environnemental de l'activité humaine, Hubert Reeves devient un militant pour la défense de l'environnement. De 2001 à 2017, il préside Humanité et Biodiversité (anciennement Ligue ROC pour la préservation de la faune sauvage et la défense des non-chasseurs), une association reconnue d'utilité publique. Il en est le président d'honneur depuis . En 2003, il publie le livre Mal de Terre qui fait un constat inquiétant de l'état de l'environnement terrestre23,24. Il participe également à une conférence avec le biologiste David Suzuki, Alerte climatique, donnée à Montréal le . Cette conférence, organisée par Équiterre en collaboration avec l'Université du Québec à Montréal et les Éditions du Boréal, est prononcée devant 3 400 personnes au palais des congrès de Montréal25,26.

En 2005 et en 2007, Hubert Reeves publie deux livres reprenant ses chroniques diffusées sur France Culture : Chroniques du ciel et de la vie et Chroniques des atomes et des galaxies. Son avant-dernier livre, Je n'aurai pas le temps, retrace le parcours scientifique de l'auteur depuis son enfance à Montréal jusqu'à aujourd'hui.

Dans plusieurs de ses publications, Hubert Reeves prône le végétarisme, à la fois pour des raisons environnementales27 et pour des raisons éthiques.

Hubert Reeves est membre du comité de parrainage de la Coordination française pour la Décennie de la culture de paix et de non-violence. Il est membre du comité d'honneur de l'Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité28, et préface le livre « Exit final. Pour une mort dans la dignité »29.

En 2007, certaines de ses pensées sont utilisées dans l'album Du simple au néant, des Ogres de Barback.[réf. nécessaire]30

Famille

Le , Hubert Reeves épouse Francine Brunel rencontrée deux ans plus tôt31. Le couple a quatre enfants : Gilles (né à Montréal), Nicolas (né à Ithaca), Benoît (né à Montréal) et Evelyne (née à Yonkers)32. La vie du couple se passe entre les États-Unis et le Québec, en fonction des contrats obtenus par Hubert. Du propre aveu de Hubert, sa carrière qui a eu l'effet d'une drogue puissante, a mené à l'échec de son premier mariage et l'a laissé dans un profond déséquilibre émotif33.

Il épouse, en secondes noces, Camille Scoffier, journaliste32. Le couple est installé à Paris, et possède une résidence secondaire, une ancienne ferme située à Malicorne, petit village de Puisaye au nord de la Bourgogne-Franche-Comté.

Anecdotes

 
Une école de Champagnole en France porte son nom.

Le , Hubert Reeves fait son arrivée à Champagnole, une petite ville du Haut-Jura. Il est venu dans une école qu'il a parrainée, et qui depuis, porte son nom.

Le , il se rend à l'école Fernand-Séguin, à Montréal, pour assister à l'inauguration du pavillon Hubert-Reeves de l'école, 3 ans et quelques mois après celui de Julie-Payette34,35.

Œuvres

Publications professionnelles

De nombreux articles dans des revues spécialisées, sur ces sujets de travaux de recherche :

  • réactions thermonucléaires dans les noyaux stellaires : fusion du carbone et de l'oxygène ;
  • spectre de neutrinos solaires ;
  • processus r et s dans les étoiles ;
  • origine des éléments légers : lithium, béryllium et bore ;
  • abondance du deutérium et de l'hélium dans le système solaire et dans l'univers ;
  • densité de l'univers ;
  • étude de la transition quark-hadron en cosmologie ;
  • origine et développement de l'énergie libre dans l'univers en expansion.

Deux livres :

  • (en) Stellar evolution and nucleosynthesis, Gordon & Breach, New York, 1968.
    • traduction : Évolution nucléaire et Nucléosynthèse, Dunod, Paris, 1968.
  • (en) Nuclear Reactions in Stellar Surfaces, Gordon & Breach, New York, 1972.

Travaux de vulgarisation

Le site officiel d'Hubert Reeves présente la plupart de ces ouvrages, avec la table des matières37.

Filmographie

  • Les étoiles naissent aussi, 1979
  • Le Soleil, notre étoile, 1980
  • La Vie dans l'univers, Série de 12 émissions de 15 minutes, 1982
  • Un soir, une étoile, Série de 66 émissions de 2 minutes, 1984
  • Hubert Reeves : Conteur d'étoile, ONF, 52 minutes version VHS, 89 minutes version DVD 200338
  • Hubert Reeves : La Terre vue du Cœur, 91 minutes, 201839

Distinctions et récompenses

Cette liste a été établie à partir des informations du site officiel d'Hubert Reeves32.

  •  
Hubert Reeves est Compagnon de l'Ordre du Canada.

Distinctions :

Notes et références

 

Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • (en) Maurice Meneguzzi, Jean Audouze et Hubert Reeves, « The production of the elements Li, Be, B by galactic cosmic rays in space and its relation with stellar observations », Astronomy and Astrophysics, vol. 15,‎ , p. 337-359 (lire en ligne [archive]). 
  • Hubert Reeves, Je n'aurai pas le temps : mémoires, Paris, Éditions du Seuil, , 348 p. (ISBN 978-2-02-097494-3 et 2-02-097494-0, présentation en ligne [archive]). 
  • Marc Bolduc, « Francine-Brunel-Reeves : portrait d'une chercheuse atypique ou quand la pratique appelle la recherche », Rabaska : revue d'ethnologie de l'Amérique française, vol. 6,‎ , p. 79-92 (lire en ligne [archive]).