Domaine(s) de compétence: 

Aurélien Barrau (né le à Neuilly-sur-Seine) est un astrophysicien français spécialisé en relativité générale, physique des trous noirs et cosmologie. Il travaille au Laboratoire de physique subatomique et de cosmologie de Grenoble (LPSC) au sein du polygone scientifique. Il est également professeur à l'université Grenoble-Alpes.

Il a été invité en tant que visiteur à l'Institute for Advanced Study (IAS) de Princeton, à l'Institut des hautes études scientifiques (IHES) de Bures-sur-Yvette1 et à l'Institut Périmètre (PI) de physique théorique au Canada2.

Il a été membre du comité de direction du Centre de physique théorique de Grenoble-Alpes et du laboratoire d'excellence ENIGMASS, et responsable du master de physique subatomique et de cosmologie de Grenoble. Il est membre nommé du Comité national de la recherche scientifique (CoNRS), section physique théorique. Il travaille actuellement sur la gravitation quantique.

Il est également docteur en philosophie. Militant écologiste, il adhère aux thèses collapsologistes et est favorable à la décroissance.

Biographie

Études

De 1990 à 1992, il étudie en classe préparatoire aux grandes écoles, Math-sup et Math-spé P', au lycée Pasteur de Neuilly-sur-Seine. Il obtient son diplôme d'ingénieur à l'École nationale supérieure de physique de Grenoble (aujourd'hui fondue dans Grenoble INP-Phelma) en 1995, en étant major de promotion. Il obtient simultanément un diplôme d'études approfondies (DEA) en physique de la matière et du rayonnement (filière physique subatomique) de l'université Joseph-Fourier (Grenoble-I) en 1995 en étant à nouveau major de promotion. Il obtient son doctorat en astrophysique à l'université Joseph-Fourier3 en 1998 avec la mention très honorable et les félicitations du jury, sur le sujet « Astrophysique gamma de très haute énergie, étude du noyau actif de galaxie mrk501 et implications cosmologiques », travail mené au LPNHE-Paris. Son habilitation à diriger des recherches (HDR) lui est délivrée en 2004 sur la thématique des trous noirs primordiaux.

Il obtient un autre doctorat, en philosophie, à l'université Paris-Sorbonne, soutenu en 2016 avec la mention très honorable et les félicitations du jury4, portant sur « Anomies : une déconstruction de la dialectique de l’un et de l’ordre, entre Jacques Derrida et Nelson Goodman ». Le travail a été mené aux archives Husserl de l'École normale supérieure et dirigé par Marc Crépon.

Activité scientifique

Aurélien Barrau travaille sur l'Univers primordial et la phénoménologie de la gravitation quantique.

Il est membre — avec Roger Penrose et Lee Smolin — du conseil scientifique du centre Sami Maroun pour la gravitation quantique.

Travaux de recherche

 
Aurélien Barrau à l'IHES en 2009.

Les activités expérimentales d'Aurélien Barrau ont porté sur l’astronomie gamma : il a étudié l’émission à très haute énergie des quasars — ou noyaux actifs de galaxies — et utilisé ces résultats, avec Jean-Loup Puget (responsable de l’expérience Planck), pour une mesure originale du fond diffus infrarouge venant des premières galaxies. Il s’est ensuite tourné vers l’expérience de recherche d’antimatière et de matière noire AMS, actuellement en fonctionnement sur la Station Spatiale Internationale ; puis vers le très grand télescope LSST destiné à la compréhension de l’énergie noire, dont il est responsable de l’étalonnage de la caméra.

Ses activités théoriques se sont portées sur les couplages entre les champs quantiques et les trous noirs. Il a montré que l’évaporation de Hawking des trous noirs gardait l’empreinte de l’existence éventuelle de dimensions supplémentaires5 ou d’une modification de la théorie gravitationnelle6 et a proposé de nouvelles manières de rechercher des trous noirs primordiaux7. Il a également suggéré un scénario original de recherche d'effets de gravitation quantique « locale » avec les trous noirs8. Dans le domaine de la cosmologie quantique, il a étudié les conséquences observationnelles, dans le rayonnement cosmologique fossile, des effets qui pourraient avoir eu lieu proche du Big Bang9. Il a proposé — en particulier avec Martin Bojowald — un modèle de « Big Bounce », issu de la gravitation quantique à boucles, où le temps disparaîtrait à très haute densité et où la structure de l’espace-temps deviendrait euclidienne10. Il travaille également, avec Carlo Rovelli, sur la possibilité que les trous noirs soient en réalité des objets en rebonds ou « étoiles de Planck »11.

Il a suggéré des moyens nouveaux pour observer des phénomènes qui auraient eu lieu avant le Big-Bang grâce aux ondes gravitationnelles12. Il a émis différentes hypothèses originales sur le rôle de la constante cosmologique13, la nature de la matière noire14 et l’interprétation de la mécanique quantique.

Il s'intéresse aux extensions de la théorie quantique des champs, notamment en présence de gravitation15.

Prix et distinctions scientifiques

Art

Aurélien Barrau interagit également avec des artistes, écrivains et cinéastes, notamment Michelangelo Pistoletto (dans le cadre d’une rencontre au musée du Louvre)20, Olafur Eliasson (dans le cadre du Palais d'hiver de Vienne), Hélène Cixous (dans le cadre de la Maison de la poésie) et Claire Denis (dans le cadre du long métrage High Life pour lequel il a été consultant)21,22.

Il est membre du comité de rédaction de la revue de poésie Hors sol23, de la revue culturelle Diacritik24, ainsi que président d’honneur de Formes élémentaires, association qui a pour but l'élaboration d'expositions d'art contemporain en dialogue avec les sciences25.

Collaborant avec le poète Mathieu Brosseau, il a publié Variations sur l'animal central où il propose une vision poétique de l'animalité au sens large.

Philosophie

Titulaire d'un doctorat de philosophie, Aurélien Barrau a collaboré avec Jean-Luc Nancy sur le concept de mondes multiples : notre univers ne serait éventuellement qu'une fraction d'un vaste « multivers »26. Selon lui, ce concept a traversé toute l’histoire de la philosophie mais « fait depuis peu effraction dans le champ de la physique théorique ». Il estime que différents univers avec des lois de la physique différentes sont envisageables. Il déclare par ailleurs :

« C'est une idée vertigineuse de réinterpréter notre univers tout entier comme un îlot dérisoire dans un immense méta-monde indéfiniment vaste et diversifié27. »

Il a travaillé sur la métaphysique de la vérité et a publié une synthèse dans l'ouvrage Chaos multiples. Il met en rapport le travail de Jacques Derrida avec la philosophie de Nelson Goodman.

Il s'intéresse à la reconstruction d'un certain scientisme naïf, sans verser dans le relativisme nihiliste. C'est la thèse développée dans La Vérité dans les sciences.

Vulgarisation

Il est l'auteur de plusieurs livres de divulgation scientifique, donne régulièrement des conférences publiques de vulgarisation d'astronomie et cosmologie, et intervient à la télévision et à la radio (notamment sur France Culture et France Inter).

Il participe à de nombreux articles dans la presse grand public (Le Monde, Libération, Le Monde Diplomatique, Le Figaro, L'Humanité, Ciel et Espace, Science et Vie, Science et Avenir...). En septembre 2019, par exemple, il prend part au numéro spécial « Espace & Cinéma » de la revue cinématographique La Septième Obsession, en définissant de nombreux termes scientifiques pour comprendre l'espace, pour un public pas nécessairement averti ; des mots comme « univers », « galaxie », « planète », « trou de ver », « trou noir », etc.28

Engagements politiques

Aurélien Barrau est engagé sur les questions d'écologie politique29. Il a notamment lancé avec l'actrice Juliette Binoche un appel intitulé « Le Plus Grand Défi de l'histoire de l'Humanité » signé par plus de 200 personnalités, dans le journal Le Monde en septembre 2018 à la suite de la démission du ministre de l'écologie Nicolas Hulot30. Cette tribune soutient qu'il faut une action politique ferme et immédiate face au changement climatique31.

Il poursuit son action en faveur de l'écologie en faisant le tour des plateaux de télévision, où il affirme que la « situation est dramatique » et parle de « crash du système planète Terre »32.

Dans le cadre du festival Climax organisé à Bordeaux du 6 au 9 septembre 201833, lors de la conférence intitulée « Quel nouveau contrat social avec le vivant ? », il transforme son intervention en tribune politique « parce que face à l’urgence, on n’a plus le choix » et réitère son appel à un changement sociétal pour préserver la vie et la planète34.

En mai 2019, il publie le livre Le Plus Grand Défi de l'histoire de l'humanité. Selon lui l'état d'urgence écologique s'appuie sur des phénomènes déjà en cours. Il cite la baisse des populations d'animaux sauvages, 60 % en moins depuis 40 ans, et la chute des deux tiers de la biomasse dans la branche du vivant qui comporte le plus d'individus et d'espèce. Il relie cela non seulement au réchauffement climatique, mais aussi à la pollution et à la disparition des espaces naturels. Il estime qu'il existe un gouffre entre les promesses des pouvoirs publics et la réalité des mesures concrètes mises en route :

« N’ayons pas l’impression qu’il faut accélérer l’effort. Il faut le commencer. Nous n’avons rien fait pour le moment. Chaque année est pire que la précédente. »

Il critique la « religion de la croissance » du PIB, un indicateur qui est, selon lui, « directement proportionnel au désastre écologique ». Il estime que le problème est avant tout systémique mais que beaucoup peut aussi être fait à l'échelle individuelle, par exemple en ne consommant plus de viande ou en se déplaçant moins35.

Il s'engage concrètement aux coté d'intellectuels comme Bruno Latour et Gaël Giraud36 et dit plaider pour un activisme fractal, c'est-à-dire un activisme déployé sur toutes les échelles37.

Publications

Notes et références

 

Voir aussi

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